Alors que le nombre de cas de Covid flambe en Europe – avec une incidence de 400 cas pour 100 000 habitants – plusieurs pays ont pris ou envisagent de prendre des mesures ciblant les non-vaccinés. Face à l’ampleur de cette nouvelle vague, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ne cache pas son inquiétude. « Nous sommes tous fatigués, mais nous avons l’hiver devant nous », avertit Catherine Smallwood, directrice des situations d’urgence pour la région Europe. « Cela s’annonce comme une période difficile. » Dans un entretien exclusif au Monde, elle détaille l’enjeu des semaines et mois à venir.

L’Europe est de nouveau le centre de l’épidémie de Covid. Quels sont les scénarios de l’OMS pour l’hiver ?

La circulation du virus accélère dans presque tous les pays européens et nous venons juste de franchir la barre des 1,5 million de morts : c’est une alerte. L’hiver s’annonce comme une période difficile mais nous savons comment freiner le virus : avec la vaccination et des mesures de protection individuelles comme le port du masque. Dans les pays où elles continuent d’être appliquées – en Espagne, au Portugal, en Italie et en France – l’incidence est plus faible qu’ailleurs.

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Dans de nombreux pays d’Europe de l’Est, la couverture vaccinale apparaît trop faible pour freiner le virus. A quoi faut-il s’attendre ?

La situation est déjà catastrophique en Roumanie et la Bulgarie, où les hôpitaux sont débordés, avec des images qui rappellent celles de mars 2020. La faiblesse de la couverture vaccinale n’est pas seulement une question de disponibilités des doses : il y a l’hésitation d’une partie de la population mais aussi un système de distribution qui n’est pas à la hauteur. Beaucoup de pays ont démarré leur campagne de vaccination en disant aux populations : « Voilà les vaccins, venez les prendre. » Cela a un peu marché au début, mais cela s’est vite arrêté. Il faut aller chercher les gens : ceux qui sont isolés, ceux qui ont des incertitudes, ceux qui n’ont pas Internet pour prendre rendez-vous…

Des mesures de type couvre-feu ou confinement pourraient-elles revenir d’actualité en Europe ?

C’est une très forte possibilité. Avant d’en arriver là, nous recommandons aux pays de prendre très tôt des mesures ciblées afin de permettre aux gens de continuer leur vie de tous les jours. Plusieurs pays l’ont fait cette semaine. Devoir rester chez soi est une extrémité à laquelle on ne veut plus arriver.

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Après deux ans, comme gérer la fatigue des populations ?

Nous sommes tous fatigués, mais nous avons l’hiver devant nous. Certains pays, certaines populations avaient l’espoir que le vaccin allait résoudre la pandémie. Mais l’OMS a toujours été claire là-dessus : cela ne suffira pas. D’autres mesures sont nécessaires, et la population doit être plus engagée qu’elle ne l’est maintenant. Même si 100 % des gens étaient vaccinés, le virus continuerait à circuler car les vaccins ne sont pas 100 % efficaces. Mais une couverture forte permet d’atteindre le but principal de la vaccination : sauver les vies. Sans le vaccin, avec le taux de cas d’aujourd’hui, nous aurions perdu beaucoup plus de vies en 2021.